Au fond du Golfe du Morbihan, découvrons les rivières souterraines de Vannes

Nous avions évoqué dernièrement la forte relation à l’eau de la ville de Vannes. Un réseau de nombreux ruisseaux constitue une part importante de la « charpente naturelle » de la ville.

En amont, la Marle ou rivière de Vannes qui se jette dans le golfe du Morbihan. L’estuaire est formé par les ruisseaux de Rohan, de Liziec et de Bilaire après leur confluence à l’étang du Duc dans la ville de Vannes. Entièrement canalisée, elle passe ensuite devant le jardin de remparts et se mêle aux eaux du golfe après la porte Saint Vincent. Le chanele qu’elle forme ensuite constitue le port de plaisance de la ville.

Nous vous proposons aujourd’hui une expédition souterraine dans les tréfonds de la ville de Vannes. Vannes abrite dans ses sous-sols des vestiges de ville ancienne. Sous le centre historique de la ville coulent encore aujourd’hui des ruisseaux. Les deux ruisseaux traversent la ville en souterrain dont les rives de la Marle et du Rohan nous racontent l’histoire d’une cité qui s’est créée il y a plus de 2 000 ans.

Les ruisseaux et l’eau de pluie qui traversent les sous-sols vannetais forment des souterrains accessibles uniquement avec un matériel spécifique : détecteur de gaz et combinaisons à bretelles, dans le meilleur des cas. Les ruines enfouies sous les rue du centre-ville sont accessibles par les techniciens des eaux. Rares sont ceux qui peuvent y accéder. Sous les pieds des vannetais serpente près d’un kilomètre de souterrains. Ni catacombes, ni égouts, ce réseau de pluie fluviale s’arpente à condition que le niveau des ruisseaux ne soit pas trop haut.

A une centaine de mètres du port de plaisance, on découvre les aménagements hydrauliques du XIVème siècle sous la place poissonnerie. En pénétrant dans le réseau d’adduction d’eau de la ville, nous comprenons vite que ce tunnel est un témoin unique de l’évolution de la cité. Sur les parois on distingue des ruptures dans la maçonnerie La taille des pierres ou encore leur agencement changent radicalement quand on se rapproche de la mer. C’est que ces deux bouts de tunnels n’ont pas été construits à la même époque…

A la fin du XIVe siècle, le duc Jean IV a en effet décidé d’agrandir l’enceinte urbaine. Il fait alors construire les remparts sud en gagnant du terrain sur la mer. Aussi dans le mur on distingue clairement une rainure par où glissait une herse qui servait de protection contre des envahisseurs qui pouvaient arriver par la mer.

Sous la pharmacie à l’angle de la place du Poids-Public de la rue Saint Vincent, on découvre les fondations d’un moulin construit par Jean IV.

Depuis la ville n’a cessé d’avancer sur le port. Désormais au-dessus du canal se trouve la place Gambetta, ses cafés et ses restaurants avec vue imprenable sur le bassin à flot.

Avec l’urbanisation le ruisseau le Rohan a été en partie recouvert par la ville mais il coule toujours en souterrain.

Notre exploration souterraine se poursuit le long du Rohan. Ce ruisseau autrefois à ciel ouvert coule aujourd’hui sous le quartier Saint-Patern. C’est par la cave d’un immeuble situé près de la rue Saint-Nicolas que nous atteignons le Rohan.

Sous les fondations de l’immeuble coule le ruisseau, et ses rives conservent les traces de la vie passée comme une souche d’arbre qui semble défier le temps. De grosses pierres entreposées semblent dessiner les contours d’un jardin.

La rivière a été recouverte au début du XXe siècle mais sur ces berges ont habité des hommes et des femmes pendant plus de 2000 ans. Ce qui est émouvant c’est de voir au cours de l’exploration les vestiges des maisons qui occupaient l’espace il y a moins d’un siècle. A trois mètres sous la rue du Colonel Maury, on découvre des maisons en pierres. On devine le rez-de-chaussée d’une maison, des portes, des fenêtres et des emmarchements qui servaient à aller puiser l’eau où à laver le linge.
Au bout de ce tunnel, la lumière des jardins de la sous-préfecture, où il débouche. Nous arrivons à une arche de pont parfaitement conservée sous laquelle coule encore le Rohan. Ce sont les fondations de l’ancien pont du Morbihan. L’ouvrage surplombait la Marle pour rejoindre l’intra-muros par la porte prison.

« C’est le pont dit de la rue Saint-Nicolas, une construction emblématique datant du moyen âge […] C’est le passage obligé entre la colline de Boismoreau et la colline du Mené. C’est le passage à gué qui a donné son premier nom à Vannes : Darioretum, littéralement « le gué bouillonnant » selon les érudits. »

Sous le boulevard de la paix, une cascade. Les souterrains ne sont pas tous maillés entre eux. Après la Marle, on accède au ruisseau du Liziec derrière le boulevard de la Paix, rue de l’Etang. Nous nous trouvons en dessous de la résidence de la tannerie. Au fond, une impasse, haute de plafond, on y trouve les vestiges d’un ancien moulin, en aval du déversoir de l’étang au duc. Il s’agit du dernier de la commune qui a fonctionné jusqu’au début des années 60.

En s’enfonçant dans les profondeurs de Vannes on réalise un retour aux sources, un voyage à travers le temps qui nous amène vers le berceau de la ville millénaire.

La ville ne porte le nom de Vannes que depuis le IVe siècle et c’est dans un texte latin du Ve siècle [1] qu’apparaît pour la première fois le nom de « Venetis ». Pourtant, la cité est mentionnée à plusieurs reprises avant cette période. Il en est par exemple fait mention dans les tables du géographe grec Ptolémée : « sous les Osismes, sur le littoral occidental, on trouve les Vénètes dont la capitale est Darioritum… ». Le nom gaulois de Darioritum désigne l’existence d’un gué, nommé « Dario » ou « Dar ». Il figure sur la table de Peutinger sous la forme de deux tours coiffées de toits pointus, symbole d’une capitale.

La dénomination de la ville dès cette période par ce terme topographique démontre l’importance du site, à la confluence d’une voie terrestre entre deux collines et d’une rivière se jetant dans un golfe puis la mer

Les espaces des glacis des remparts ont été aménagés en parc urbain. Ce jardin à la française met en valeur les anciens lavoirs et la Marle apparente à cet endroit. La relation à l’eau de cette partie de la ville est forte comme en témoigne les anciens lavoirs.

Outre les rivages, le site de Vannes est marqué par trois collines : le Mené (montagne en breton) où se situe la ville intra-muros, la colline de Boismoreau où s’est développé le quartier Saint-Patern, et la colline de la Garenne qui accueille aujourd’hui l’hôtel de la préfecture et ses jardins, le parc de la Garenne ainsi que l’hôtel du département du Morbihan.

Cependant cette implantation présentait certaines contraintes topographiques. Il s’agissait d’une zone marécageuse due à la confluence des ruisseaux de Meucon et de Groutel (venant de l’étang au Duc). Cette zone de marécages rendait les constructions et les communications difficiles. De plus, elle isolait entre elles les trois collines qui composent le site. Actuellement le sol est situé 6 à 8 m plus haut que le niveau d’origine suite aux nombreux remblais effectués au long de l’histoire alors que la colline de La Garenne a été écrêtée à l’époque moderne.

Après cette parenthèse en eau douce, nous reprendrons prochainement la mer du golfe pour continuer notre navigation sur cette petite mer